Après être montée dans son train de justesse, Lucie s’était endormie sur l’épaule d’un passager qui n’avait pas osé la réveiller. Elle finit par émerger, une demi-heure avant son arrivée en gare. Elle s’était morfondue en excuses, et pour lui faire comprendre qu’il ne lui en voulait pas, le passager lui dit qu’elle était très belle. Lucie se sentit rougir, et se contenta de lever les yeux au ciel. Elle mit en marche son baladeur et au bout de quelques minutes, elle se tourna vers son voisin :
- Vous voulez écouter ? dit-elle en tendant un des écouteurs, si bien qu’il ne pouvait guère refuser.
- Heu oui qu’est ce que c’est ?
- Peu importe, ça vous plaira. Moi c’est Lucie, et vous ?
- Mathéo.
Ils se regardèrent un long moment, se laissant envahir par les notes de guitare et la voix douce et rauque dans leurs oreilles.
- Qui est-ce ? insista Mathéo.
- C’est un album écrit par l’homme que j’aime pour la femme qu’il aimait.
- Vous êtes souvent mystérieuse comme ça ou c’est votre technique de séduction ?
- Vous aimez ?
- La musique ou la technique ? A vrai dire, j’aime beaucoup les deux…
- Tant mieux alors.
A nouveau, le silence s’installa entre les deux compagnons de voyage. Le piano avait remplacé la guitare, et la voix s’était tue, comme pour laisser au contrôleur le temps d’annoncer la prochaine gare.
- C’est ici que je sors, dit Lucie en rangeant précipitamment ses affaires. Vous permettez ?
Mathéo lui rendit, non sans regret, son écouteur.
- Je n’ai même pas ton numéro de téléphone ! tenta-t-il
- On se tutoie déjà ? A quoi te servirait donc un numéro puisqu’en rentrant ta mère va laver ton jeans avec le petit bout de papier sur lequel je l’aurais écrit, si bien que l’encre aura été effacée et le numéro sera illisible, expliqua Lucie.
- Aucun risque ma mère est décédée, lâcha Mathéo.
Elle sortit un stylo de son sac à main, gribouilla les chiffres sur un coin de serviette en papier, le déposa rapidement sur la table et s’enfuit presque vers la sortie du train. Elle était arrivée.
Le cœur d’Antoine battait à la chamade. Pourquoi juste aujourd’hui, à cette heure là ? Il frappa du poing contre son volant, mais la colère n’y ferait rien. Il était coincé derrière un tracteur, impossible de doubler. Il était en retard à présent et s’en voulait de ne pas être parti avant. A défaut de pouvoir avancer plus vite, il augmenta le volume de la radio. Aux informations, on annonçait un crash d’avion, un tremblement de terre, un attentat et 2-0 pour l’Olympique Lyonnais.
Déçue, Lucie prit les escalators pour descendre dans la gare. Elle se prit à douter : et s’il ne venait pas ? Il était sans doute en retard. Etait-ce une habitude ? Elle eu beau fouiller dans sa mémoire, impossible de s’en rappeler. Soudain, le téléphone.
- Allo ? Allo ?
L’interlocuteur avait déjà raccroché. Lucie regarda l’appareil, circonspecte. C’était sans doute Mathéo, qui vérifiait qu’elle lui avait donné le bon numéro et qui l’appelait en anonyme. Elle se demanda ce qui lui avait pris de passer comme ça son numéro de téléphone à un inconnu. Sa dernière phrase ? Sûrement. Et puis, après tout, il lui avait plu avec ses yeux en amande et ses cheveux bouclés. On aurait dit un ange. Ou un petit diable. Peut-être un peu des deux. Et puis, Lucie croisa enfin le regard d’Antoine. Au bout de l’allée qui menait vers le centre de la gare. Il était debout, l’air un peu penaud. « Ne cours pas… » se répéta intérieurement Lucie. Elle l’observa un peu. Il avait l’air plus vieux, plus mûr. La barbe qu’il laissait apparemment pousser lui donnait un air sérieux et espiègle à la fois. Ses yeux n’avaient pas changé. D’un bleu profond, tirés vers le bas. Ils lui donnaient toujours un regard triste. Il avait, comme à son habitude, protégé ses mains par des gants. Un musicien maniaque, mais précautionneux. Comme elle aimait ses mains ! Elle eu soudain envie de le toucher, de l’embrasser, de l’aimer comme avant. De se sentir protégée, de se lover tout contre son torse. Elle eu envie de le prendre dans ses bras. Mais lorsqu’elle parvint à lui, elle l’embrassa sur les deux joues et lui dit « bonjour ».
- Vous voulez écouter ? dit-elle en tendant un des écouteurs, si bien qu’il ne pouvait guère refuser.
- Heu oui qu’est ce que c’est ?
- Peu importe, ça vous plaira. Moi c’est Lucie, et vous ?
- Mathéo.
Ils se regardèrent un long moment, se laissant envahir par les notes de guitare et la voix douce et rauque dans leurs oreilles.
- Qui est-ce ? insista Mathéo.
- C’est un album écrit par l’homme que j’aime pour la femme qu’il aimait.
- Vous êtes souvent mystérieuse comme ça ou c’est votre technique de séduction ?
- Vous aimez ?
- La musique ou la technique ? A vrai dire, j’aime beaucoup les deux…
- Tant mieux alors.
A nouveau, le silence s’installa entre les deux compagnons de voyage. Le piano avait remplacé la guitare, et la voix s’était tue, comme pour laisser au contrôleur le temps d’annoncer la prochaine gare.
- C’est ici que je sors, dit Lucie en rangeant précipitamment ses affaires. Vous permettez ?
Mathéo lui rendit, non sans regret, son écouteur.
- Je n’ai même pas ton numéro de téléphone ! tenta-t-il
- On se tutoie déjà ? A quoi te servirait donc un numéro puisqu’en rentrant ta mère va laver ton jeans avec le petit bout de papier sur lequel je l’aurais écrit, si bien que l’encre aura été effacée et le numéro sera illisible, expliqua Lucie.
- Aucun risque ma mère est décédée, lâcha Mathéo.
Elle sortit un stylo de son sac à main, gribouilla les chiffres sur un coin de serviette en papier, le déposa rapidement sur la table et s’enfuit presque vers la sortie du train. Elle était arrivée.
Le cœur d’Antoine battait à la chamade. Pourquoi juste aujourd’hui, à cette heure là ? Il frappa du poing contre son volant, mais la colère n’y ferait rien. Il était coincé derrière un tracteur, impossible de doubler. Il était en retard à présent et s’en voulait de ne pas être parti avant. A défaut de pouvoir avancer plus vite, il augmenta le volume de la radio. Aux informations, on annonçait un crash d’avion, un tremblement de terre, un attentat et 2-0 pour l’Olympique Lyonnais.
Déçue, Lucie prit les escalators pour descendre dans la gare. Elle se prit à douter : et s’il ne venait pas ? Il était sans doute en retard. Etait-ce une habitude ? Elle eu beau fouiller dans sa mémoire, impossible de s’en rappeler. Soudain, le téléphone.
- Allo ? Allo ?
L’interlocuteur avait déjà raccroché. Lucie regarda l’appareil, circonspecte. C’était sans doute Mathéo, qui vérifiait qu’elle lui avait donné le bon numéro et qui l’appelait en anonyme. Elle se demanda ce qui lui avait pris de passer comme ça son numéro de téléphone à un inconnu. Sa dernière phrase ? Sûrement. Et puis, après tout, il lui avait plu avec ses yeux en amande et ses cheveux bouclés. On aurait dit un ange. Ou un petit diable. Peut-être un peu des deux. Et puis, Lucie croisa enfin le regard d’Antoine. Au bout de l’allée qui menait vers le centre de la gare. Il était debout, l’air un peu penaud. « Ne cours pas… » se répéta intérieurement Lucie. Elle l’observa un peu. Il avait l’air plus vieux, plus mûr. La barbe qu’il laissait apparemment pousser lui donnait un air sérieux et espiègle à la fois. Ses yeux n’avaient pas changé. D’un bleu profond, tirés vers le bas. Ils lui donnaient toujours un regard triste. Il avait, comme à son habitude, protégé ses mains par des gants. Un musicien maniaque, mais précautionneux. Comme elle aimait ses mains ! Elle eu soudain envie de le toucher, de l’embrasser, de l’aimer comme avant. De se sentir protégée, de se lover tout contre son torse. Elle eu envie de le prendre dans ses bras. Mais lorsqu’elle parvint à lui, elle l’embrassa sur les deux joues et lui dit « bonjour ».
[A suivre...]
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